Réparation du préjudice d’anxiété

 « Le point de départ du délai de prescription de l’action est la date à laquelle le salarié a eu connaissance du risque élevé de développer une pathologie grave résultant de son exposition à l’amiante. Ce point de départ ne peut être antérieur à la date à laquelle cette exposition a pris fin ».

La Cour d’appel doit rechercher à quelle date les salariés ont  cessé d’être exposés à un risque élevé de développer une pathologie grave résultant d’une exposition à l’amiante.

Le 28 mai 2015, 70 anciens agents de la SNCF, victimes d'une exposition à l’amiante dans le cadre de leur travail, ont saisi la juridiction prud’homale, aux fins d’obtenir la condamnation de leur employeur au paiement de dommages-intérêts en réparation de leur préjudice d’anxiété et pour violation de l’obligation de sécurité.

Par arrêts du 5 septembre 2018, la cour d’appel a déclaré leur action irrecevable au motif que l'action  était prescrite.

Les salariés se pourvoient en cassation. Ils rappellent que la prescription des actions ouvertes aux salariés aux fins d’indemnisation du préjudice lié à l’exposition à l’amiante ne court qu’à compter du jour où ces salariés ont eu connaissance du risque à l’origine de l’anxiété c’est-à-dire à compter du jour où ils détiennent l’ensemble des éléments nécessaires à la connaissance de la dangerosité de l’exposition à laquelle ils ont été soumis.

Ils soutiennent d’autre part qu’en refusant de fixer le point de départ du délai de prescription de l’action des agents à la date à laquelle avait été mis en service le local de confinement de l’amiante le 1er janvier 2014, c’est-à-dire à la date à laquelle ils avaient été mis en possession de l’ensemble des éléments nécessaires à la connaissance du risque à l’origine de leur anxiété la cour d’appel a violé l’article L. 1471-1 du code du travail dans sa version applicable au litige, ensemble l’article 6, § 1, de la Convention européenne des droits de l’Homme.

Fin de l'exposition au risque

La Cour d’appel doit rechercher la date à quelle date les salariés ont  cessé d’être exposés à un risque élevé de développer une pathologie grave résultant d’une exposition à l’amiante.

Par arrêt du 8 juillet 2020 (n° 18-26585 et suivants), la Haute juridiction statue :

« Réponse de la Cour

Vu l’article L. 1471-1 du code du travail, dans sa rédaction antérieure à l’ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017 :

  1. Aux termes de ce texte, toute action portant sur l’exécution du contrat de travail se prescrit par deux ans à compter du jour où celui qui l’exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d’exercer son droit.
  1. Par ailleurs, en application des règles de droit commun régissant l’obligation de sécurité de l’employeur, le salarié qui justifie d’une exposition à l’amiante, générant un risque élevé de développer une pathologie grave, et d’un préjudice d’anxiété personnellement subi résultant d’une telle exposition, peut agir contre son employeur pour manquement de ce dernier à son obligation de sécurité.

 

  1. Le point de départ du délai de prescription de l’action par laquelle un salarié demande à son employeur, auquel il reproche un manquement à son obligation de sécurité, réparation de son préjudice d’anxiété, est la date à laquelle le salarié a eu connaissance du risque élevé de développer une pathologie grave résultant de son exposition à l’amiante. Ce point de départ ne peut être antérieur à la date à laquelle cette exposition a pris fin.
  1. Pour déclarer prescrite l’action des salariés, les arrêts retiennent que le 30 janvier 2001, lors de la réunion du CHSCT, les représentants du personnel ont fait grief à l’employeur de ne pas appliquer le décret n° 96/98 du 7 février 1998 traitant de la protection des travailleurs exposés aux fibres d’amiante, après la découverte par des agents d’un produit amiantifère lors d’une intervention sous le plancher d’un chaudron, qu’en 2004, une cabine de désamiantage a été installée dans le bâtiment N, et que donc au plus tard en 2004, les salariés avaient ou auraient dû avoir conscience d’un risque d’exposition à l’amiante, présente sur le site où ils exerçaient leur activité professionnelle, qu’a confirmé en 2005, l’interdiction d’utilisation des enduits Becker, compte tenu de la concentration en fibres d’amiante qu’ils contenaient, puis les interventions particulièrement fermes à compter de 2011 de la DIRECCTE.
  1. En se déterminant ainsi, sans rechercher à quelle date les salariés avaient cessé d’être exposés à un risque élevé de développer une pathologie grave résultant d’une exposition à l’amiante, la cour d’appel a privé sa décision de base légale.

PAR CES MOTIFS, et sans qu’il soit nécessaire de statuer sur la première branche du second moyen, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes leurs dispositions, les arrêts rendus le 5 septembre 2018, entre les parties, par la cour d’appel de Reims ;(…) »

Source : Légifrance

Image :

Créateur : Alain Bachellier 
Droits d'auteur : utilisation libre aux conditions Créatives Commons
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